On peut, sans être un disciple d’Antonio Gramsci, admettre que cette phrase écrite au début du siècle dernier, est aujourd’hui d’une pertinence sidérante : « le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres. »
Le vieux monde se meurt en effet, à la fois désenchanté par des alternances successives qui ont généré beaucoup de désillusion dans l’opinion, et hystérisé par les populistes de tout poil, par certains médias et les réseaux sociaux.
Affirmer que les promesses électorales sont présentées dans le but premier de remporter l’élection n’est pas faire injure aux candidats.
C’est leur mise en application qui est, pour diverses raisons, parfois difficile : l’élu se heurte à la réalité de la situation économique et à l’omniscience des grands corps d’État, à la tradition jacobine de la haute fonction publique qui fait obstacle à la volonté politique. Enfin, lors des campagnes, les promesses se font sans bien sûr prendre en compte des événements majeurs dont l’élu n’est pas responsable mais qui sont susceptibles d’entraver ses projets à tout moment.
Deux exemples : Nicolas Sarkozy a vécu en 2008 une crise financière mondiale consécutive à la faillite de Lehman Brothers, Emmanuel Macron aura dû faire avec la pandémie dont le traitement a fait exploser la dette, et termine son quinquennat avec une guerre qui, au delà de l’horreur que vivent les ukrainiens et de l’inquiétude quant à une possible extension, provoque une inflation historique et incontrôlable. Trois évènements dont l’origine est extérieure au pays, totalement subis.
Il y a fort à parier que la plupart des promesses faites actuellement ne seront pas tenues, les unes en raison du non respect de sa parole par l’élu (ou l’élue), les autres à cause de la situation internationale ou, allez savoir, d’une nouvelle pandémie, d’une catastrophe climatique etc…
Le décalage ressenti par les électeurs entre les incantations pré-électorales des candidats et la réalité des politiques conduites est à l’évidence accentué par les discours populistes, ceux en France des Le Pen, Zemmour ou Mélenchon (pour l’essentiel) qui multiplient les promesses dont il est évident, pour qui prend un peu de recul, qu’elles sont intenables, mensongères, ou qu’elles conduiraient le pays dans l’impasse.
Lorsqu’il s’agit, par exemple, de la question du pouvoir d’achat qui devient un sujet majeur, il est relativement facile de faire chanter les sirènes.
Ces gens tiennent des propos qui divisent par leur radicalité, propulsés par des médias amis ou complaisants, exacerbés par la violence qui s’exprime sur les réseaux sociaux.
Ces gens qui cultivent le clair-obscur dont parlait Gramsci, qui préparent le surgissement des monstres, ces porteurs de fascisme.
Et peu importe que ce fascisme soit de droite ou de gauche, il est à combattre sans relâche pour espérer que le nouveau monde ne soit pas pire que l’ancien.
Marc T.