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Non, parrainer Zemmour n’a rien de vertueux

On la voit bien venir cette petite musique qui nous explique qu’un candidat dont les sondages seraient supérieur à, par exemple 10%, doit absolument pouvoir se présenter. Quel qu’il soit et indépendamment des idées qu’il (ou elle) diffuse, que celles-ci soient républicaines ou pas, nauséabondes ou pas.
Ce quota sondagier qui ouvrirait la porte à la candidature aurait-il un pendant opposé, qui décrèterait qu’au dessous d’un certain seuil, par exemple 5%, les prétendants devraient renoncer ?

Il ne s’agit pas, bien entendu, de censurer tel ou telle personnage politique, ni d’entraver sa liberté d’expression.
En revanche, au nom de quoi devrions nous faciliter la propagation de doctrines qui rappellent les heures les plus sombres de notre histoire ?
Est-il démocratique, républicain ou même moral de contribuer volontairement à l’audience d’un candidat seulement guidé par quelques obsessions sécuritaires, par l’exclusion de pans entiers de la population, ouvertement raciste, antisémite, misogyne, homophobe, falsificateur de l’histoire à son profit ?
De l’aider dans son entreprise de démolition de la société française ?

Zemmour a tout à fait le droit d’exprimer ses idées. Mais qu’il s’en débrouille.
S’il ne parvient pas à obtenir les parrainages nécessaires, c’est qu’il n’aura pas trouvé 500 élus sur 42000 possibles pour considérer que ses idées méritent d’être défendues. 1,19% des élus est au moins aussi significatif que 15% des sondés, mais c’est ainsi qu’est née cette théorie grotesque qui voudrait que parrainer n’est pas soutenir.
Qui peut raisonnablement affirmer que favoriser l’accès à une campagne présidentielle à un danger avéré pour la concorde nationale relève d’un comportement républicain ?
On a vu cette semaine un équilibriste de grand talent, David Lisnard, maire LR de Cannes et président de l’Association des Maires de France parrainer bruyamment Mélenchon en clamant qu’il l’a fait « par esprit républicain, souci civique, exigence démocratique, aussi pour que les démagogues ne jouent pas les victimes, enfin pour enlever de la pression (injuste) sur les maires et démontrer que «parrainage ne vaut pas soutien»».
Tactique habile pour déculpabiliser le parrainage Zemmour dont la candidature est indispensable à Valérie Pécresse pour battre Le Pen et accéder au second tour. Restons persuadés que les maires de France ont vu la très grosse ficelle tendue par Lisnard, et qu’ils n’ont de toutes façons pas nécessairement besoin qu’on leur explique si parrainage vaut ou non soutien.
On peut imaginer que, lorsque son candidat naturel n’a aucune difficulté à réunir les parrainages, un maire puisse en désigner un autre sans pour autant réaliser un grand écart idéologique, sans renier l’ensemble de ses valeurs tout en invoquant « l’exigence démocratique » d’un tel geste dont au passage, il est normal qu’il soit connu de ses électeurs.

Nous devons veiller à ce que Zemmour puisse défendre ses idées, et même se porter candidat à l’élection présidentielle. Mais parvenir à convaincre 500 élus que sa candidature présente un intérêt pour la France est de sa seule responsabilité. 500 sur 42000, le seuil qui crédibilise une candidature, et pour mémoire, permet d’accéder à des financements publics.
Faisons plutôt confiance aux 36000 maires et aux autres élus pour apporter (ou non) leur parrainage au candidat de leur choix pour de bonnes raisons, pour des motifs politiques, pour leurs propositions.

Et laissons l’exigence démocratique s’imposer naturellement.

Marc T.

Illustration : dessin de Pessin pour Slate.fr

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